La face cachée de Mercure

 

 

Cette vue inédite de Mercure (ci-contre) résulte de la combinaison des soixante meilleures images prises par les astronomes de l'université de Boston en août 1998 avec le télescope du mont Wilson. Le point brillant dans l'hémisphère nord est peut-être un jeune cratère.

Mercure depuis la Terre (6 ko)

Article de presse

Elle s'était fait discrète depuis que la sonde Mariner 10 avait révélé quelque uns de ses reliefs en 1974-75. Et pour cause : Mercure compte parmi les planètes les plus difficiles à photographier depuis le sol. En testant un nouveau procédé d'imagerie, Jeffrey Baumgartner, Michael Mendillo et Jody Wilson, de l'université de Boston (États-Unis), ont pourtant réussi à obtenir des clichés étonnants de la petite planète, qui plus est d'une région encore inconnue. "Ce sont les meilleures images de Mercure que j'ai vues depuis longtemps. Leur méthode est astucieuse" , s'exclame François Colas, planétologue à l'Institut de mécanique céleste (ex-Bureau des longitudes). Pour les réaliser, les trois astronomes, qui ont utilisé en août 1998 le télescope de 1,5 m du mont Wilson, ont dû contourner une grosse difficulté : Mercure est la planète la plus proche du Soleil. Elle ne se montre aux observateurs qu'une demi-heure à peine avant le lever et après le coucher de celui-ci. Entre les deux, le Soleil réchauffe l'atmosphère terrestre et provoque une forte turbulence. Pas question pour Hubble de viser un objet aussi proche du Soleil sous peine d'endommager ses instruments.

Les scientifiques ont donc utilisé une caméra vidéo, qui a pris 60 images par seconde, continuellement, pendant une heure et demie. A cette vitesse, on peut espérer, parfois, passer au travers des turbulences. Les meilleures parmi... 340 000 images ont été sélectionnées, puis traitées par des logiciels pour en éliminer les défauts. Finalement, elles ont été superposées pour donner cette vue inédite de Mercure. Mais les mers et les cratères que l'on y distingue existe-ils réellement ? Difficile à confirmer car ils n'ont pas été photographiés par Mariner 10. Peut-il s'agir d'artefacts ? les chercheurs écartent cette hypothèse en faisant remarquer que certaines zones caractéristiques de l'image collent assez bien avec les observations effectuées par des radars au sol, qui ne sont pas, eux affectés par la turbulence.

Un point brillant dans l'hémisphère nord retient particulièrement l'attention. "Il est peu probable que cela soit de la glace, vu la température de surface de Mercure, mais cela pourrait être un cratère jeune" , avance François Colas. Bien des questions restent encore sans réponse. Comment la planète s'est-elle formée ? Y a-t-il de la glace dans certains cratères toujours à l'ombre ? Mercure a-t-elle réellement une "queue de sodium" longue de trois fois son rayon ? Il faudra, pour cela, rapprocher les observations radar, optiques et spectrales. Les chercheurs américains vont bientôt appliquer leur procédé à la reconstitution d'images, prises avec un spectrographe de leur conception, de l'atmosphère ténue de Mercure, qui contient des éléments tels que les le sodium, arrachés à la surface par le bombardement du vent solaire. En attendant que les missions Messenger de la Nasa, programmée pour 2004, et Bepi Colombo de l'Esa, dont la réalisation pourrait être décidée en septembre (2000), n'aillent voir sur place de quoi il retourne.

Jean-François Haït

Ciel & Espace juillet 2000 

Crédit photo : Baumgartner & al. Boston University

 

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